03.04.2025
IX.
Je suis le vent marin.
Ma langue est humide mais rêche.
Parfois je suis brise frisante
qui caresse les flots,
aujourd’hui je suis vigoureux
et les froisse avec fureur,
remue les courants pélagiques
et fait claquer les vagues sur les
côtes rocheuses dans un grand fracas
et de grandes gerbes blanches et superbes.
Sur mon passage,
le petit monde aquatique s’enfuit
et se retranche dans les profondeurs.
Les anguilles se lovent
dans les anfractuosités les plus sombres,
les crabes s’enfouissent
dans les entrailles du sable,
rougets et pieuvres se réfugient
sous les forêts d’algues.
Tous savent et ne s’affolent pas.
Ils laissent passer ma décharge violente.
Je ramène tout vers le rivage,
méduses, alevins trop fragiles
pour lutter contre mon souffle,
plastiques démembrés et
déchets emmêlés.
Maria pédale et elle peine, je la contre.
Je n’ai nulle intention malveillante,
je souffle, c’est tout.
Elle respire fort
et la chaleur rend son effort pénible,
elle essaie de chanter mais n’y parvient pas.
La mélodie reste cloîtrée dans sa poitrine.
Ses jambes font un mouvement plus lent
et je sens que son esprit s’allège,
elle cesse le combat.
Lorsqu’elle attaque la dernière côte,
elle rend les armes,
finit à pied, poussant son vélo.
Bientôt elle est devant la conserverie.
Elle s’adosse au mur,
mains sur les genoux,
et regarde le ciel avant d’entrer.